Un roman russe Emmanuel Carrère

Un homme qui a pu écrire une biographie sublime de Philip K Dick Je suis vivant et vous êtes mort  (titre sublime, tout l’univers de K Dick dans une phrase), ainsi qu’un livre sur l’affaire Roman L’adversaire, tout aussi sublime a eu et a toute votre sympathie. Vous voilà donc plongé dans son nouveau livre. Premier point, intitulé, Un roman russe ce n’est en aucun cas un roman, un coté russe peut être, mais pour le reste c’est au choix de l’égo non fiction (du Christine Angot en mieux) ou une mise en abyme de l’âme de l’auteur. Votre plongée a lieu en apnée, à aucun moment  vous ne pouvez reprendre votre souffle. Vous suivez donc l’auteur dans son histoire amoureuse, dans son histoire familiale et dans son histoire professionnelle. Tout ce lie et se délie, Emmanuel Carrère cherche dans tout cela une sortie de crise, contrer ses démons, trouver la paix en apaisant le passé pour mieux construire l’avenir…mais en combattant ses démons il doit y laisser des victimes, et avancer avec des blessures qui peuvent avoir du mal à se refermer. Vous êtes dans son âme, dans son corps, vous souffrez avec lui. L’épisode de la nouvelle publiée dans le monde, tout le mécanisme réfléchi, huilé, qui d’une déclaration d’amour par l’intermédiaire de 600000 lecteurs , se transforme en suicide d’une relation, est magnifique et cruel dans sa représentation des schémas mentaux que l’on peut se faire et qui s’effondrent au contact du réel. Ces démons trouvent miroir dans les vôtres, l’universalité des névroses, du passé caché et oublié et de l’affrontement pour se (re)construire. Vous soupçonnez presque ce livre d’avoir ouvert des vannes chez vous, mais vous ne lui en voulez même pas, vous le remerciez, c’est le pouvoir de la littérature quand elle est à son meilleur, l’universalité d’un message dans des mots et un apaisement (provisoire ?) final en tentant de faire la paix.